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10.10.2023
Actualités

Quel roman national voulons-nous écrire avec nos marques ?

  • Par Florian Gambardella - Directeur du planning stratégique

Les marques ont pris le lead dans la construction de nos imaginaires. Pour le meilleur et pour le pire. Voilà la thèse de Raphaël LLorca, auteur du Roman national des marques. Mardi 3 octobre, il échangeait avec Laurence de Nervaux, directrice du think tank Destin Commun, et Nicolas Vanbremeersch, président de Spintank. Mais les marques ne racontent rien sans celles et ceux qui les créent et les animent au quotidien, les communicants en premier lieu. Pour leur éviter – filons la métaphore – l’angoisse de la page blanche, voici quelques pistes pour raconter des histoires partagées, des campagnes et dispositifs positifs pour tous et toutes.

Les analyses de Raphaël Llorca sont toujours puissantes, parce qu’elles prennent à rebours nos pratiques. Nous avons l’habitude dans nos métiers de nous nourrir d’analyses sociologiques, études quanti et quali, sondages, essais… pour les adapter à nos problématiques clients. Avec, c’est inévitable, une part de paris, d’à-peu-près. Raphaël Llorca, lui fait le chemin inverse. Il débarque dans le champ de la recherche politique et sociale avec des matrices d’analyse de communicant, issues du branding, storytelling et autres anglicismes en -ing dont nous raffolons. Un dialogue toujours rare, qui aide à renouveler à la fois le regard du citoyen dans la cité, comme celui du communicant dans son métier.

Avec Le Roman national des marques, Raphaël Llorca pose une thèse forte : dans un contexte de panne d’un roman national porté par les acteurs publics (politiciens et politiciennes en tête), on assiste à une privatisation de l’imaginaire de la France par les marques. C’est le fil rouge de 384 pages aussi fouillées que plaisantes à lire, qui questionnent également nos métiers. Les stratèges et créatifs des agences, comme les directions de communication des annonceurs. Devons-nous encourager, réorienter, aller contre ce nouveau pouvoir des marques – privées comme publiques – (et le pouvons-nous, d’ailleurs) ?

Concrètement : voici quatre tensions conceptuelles, nés de l’échange entre Raphaël, Laurence et Nicolas. Des tensions que les marques doivent réussir à résoudre. En choisissant son camp, ou en essayant de sortir par le haut. De quoi enrichir nos stratégies et nos créations.

 

Dans une société en perte de sens, les marques doivent-elles promettre une relation hyper-personnalisée, ou bien chercher à recréer un récit commun ?

Multipolarisation des modes de vie, sentiment de disparition de la classe moyenne… les socles unificateurs de la société française semblent se dissoudre, avec une incapacité de la classe politique à y remédier efficacement. Les marques ont deux choix : abandonner elles aussi cet échelon national, pour proposer une expérience hyper-individualisée, répondant aux pratiques et représentations de chaque utilisateur-consommateur. Ou bien, reprendre à ses frais la promotion d’un vécu commun et mobilisateur. Mais cette mission dépasse les moyens d’une seule marque, si hégémonique soit-elle ? Peut-on imaginer une Union sacrée des marques autour de cette cause ?

Sur mon axe de benchmark, je place : la promesse de réponse à chaque plaisir coupable d’Uber Eats (ça arrive), en regard de l’histoire d’une solidarité entre dockers face à l’inflation d’Intermarché.

 

Dans un monde du reporting, du chiffre, de la transparence, serez-vous un conteur ou un compteur ?

Entre la crainte de la crise de réputation, la complexification des enjeux et des émetteurs, les marques osent de moins en moins prendre sur elles de raconter une histoire unifiée, puissante… et forcément simplifiée, voire simpliste. Il est plus simple de se focaliser sur le particulier, l’élément de preuve, l’indicateur ponctuel… une posture qui a néanmoins sa puissance quand elle est poussée à son terme.

Deuxième benchmark :  RTE, le pilote impartial du mix énergétique français et Vattenfall, qui promet une « vie sans carbone » en une génération.

 

Faut-il chercher à recréer la grand-messe du 20h ou bien assumer d’être dans une « société de la playlist » ?

Une des causes de la perte de la cohésion de nos sociétés réside dans la perte d’expériences partagées par tout le monde, où chacun ressent intimement qu’il participe d’une communauté qui le dépasse. C’est d’ailleurs une des raisons du succès de la Coupe de monde de football, un des derniers moments « synchrones » de notre société. En cause, entre autres, les évolutions médiatiques (de la chaîne unique de l’ORTF à la prolifération actuelle)… mais aussi les marques, qui travaillent à se créer des identités, des expériences de marques très typées, chacune dans leur différence concurrentielle.

Troisième axe, l’opposition entre Michel-Edouard Leclerc, ministre de la consommation autoproclamé, et Ikea, parenthèse hygge scandinave, au beau milieu de nos banlieues.

 

Raconter la France, oui mais quelle France ?

Éternelle ou en mutation, défensive ou ouverte, du passé ou à venir ? Que ce soit pour porter des discours progressistes ou réactionnaires, l’héritage reste bien plus mobilisé que la projection. Et pourtant, il y aurait de quoi faire, pour mobiliser positivement dans un contexte de nouvelles révolutions industrielles, énergétiques, sociales.

Et enfin, je positionne Cyrano de Bergerac cité par Nike (et Oxmo Puccino), face à SNCF qui donne-vous la parole à un jeune enfant pour nous interpeler : « Quel écolo tu es ? »

 

S’il y a une notion qui sous-tend ces discussions, c’est celle de responsabilité. La nécessaire prise de conscience par les marques de leur pouvoir, et de la responsabilité associée. Le terme a été prononcé dans les échanges, mais comme un vœu pieux. Et oui, il ne faut certainement pas attendre des marques de résoudre la panne du récit national à elles seules. Et pourtant, elles l’impactent. Et c’est aussi aux dircoms, aux planneurs, aux CR, aux créas, aux consultants de prendre leur responsabilité pour proposer des stratégies qui fassent se rencontrer l’ambition des marques avec l’intérêt collectif. Sans oublier qu’il s’agit aussi d’une opportunité, pragmatiquement : que ce soit pour les relations parties prenantes, la compliance RSE, ou encore la performance économique durable.

Alors chiche ?